Fils d’un cantonnier chargé de l’entretien des digues de l’Île-de-Ré, et d’une paysanne, Jules Elie Volci PERRIER naît le 16 septembre 1837, à Ars-en-Ré (Charente-Maritime), où il passe son enfance. Adulte, il s’associe avec un autre Casseron plus aisé, Théodore Alfred Gérain, pour ouvrir à Paris un magasin de nouveautés, qui est déclaré en faillite en mai 1869.
Il ouvre ensuite un autre magasin rue Turbigo, et prend part à l’agitation républicaine.
En 1870, durant le Siège de Paris, il est capitaine d’habillement au 230e bataillon de la Garde Nationale. Il conservera ce grade après la proclamation de la Commune de Paris. Ardent partisan de la Commune, il tient chez lui des réunions publiques et au mois de mai, il prend part aux terribles combats contre les Versaillais. Il est alors lié avec Félix Pyat, Marc-Amédée Gromier et Louis Brunereau (Rétais comme lui). Après la Semaine sanglante, parvenant à échapper au troupes versaillaises, il se cache durant quelques mois avant de pouvoir, munis de faux papiers, passer en Suisse, en août 1871. Le 20 juin 1874, un Conseil de guerre le condamne par contumace à la déportation à vie dans une enceinte fortifiée pour faits insurrectionnels.
A Genève, Jules Perrier ouvre un nouveau commerce de tissus, puis un magasin spécialisé dans le deuil. Il fréquente alors les autres proscrits de la Commune et ceux qu’on appellera bientôt les anarchistes, comme le géographe Elisée Reclus . Il participe au traditionnel banquet d’anniversaire du 18 mars, et n’hésite pas comme à venir en aide aux anarchistes dans le besoin (allant jusqu’à leur procurer un logement), ou en leur fournissant les moyens d’organiser des réunions au Café du Rhône. Fidèle à son passé de communard, il collecte tous les livres, journaux, photographies, tableaux, correspondances, et autres objets liés a l’histoire de la Commune.
Il reçoit des visites, en particulier celle de son beau-frère, Louis Lucas, huissier à Ars , qui a épousé Joséphine-Juliette Perrier : cela vaut à Lucas, une perquisition en règle dans son étude ou l’on trouve des exemplaires de Les prisons de Kropotkine et des Cahiers du Peuple de Félix Pyat. Lucien Descaves, académicien Goncourt qui veut écrire un livre sur les communard nous livre cette anecdote :(cf philémon)
C’était un vieil homme ombrageux et malade qui vivait d’avoir connu Reclus, Pyat et Gambon. Leurs portraits ornaient sa boutique, où il attendait une clientèle boudeuse en dressant le catalogue de ses livres et de ses reliques. Les acheteurs avaient fini par comprendre qu’ils le dérangeait et n’étaient pas revenus. Il se nommait Jules Perrier. Genève a hérité de sa bibliothèque révolutionnaire. Un jour que je lui demandais je ne sais quel détail sur la commune, il appela un jeune commis et lui dit : « le dossier sur la semaine sanglante : ». le commis prit une échelle et trouva, sur un rayon élevé, la liasse réclamée que nous compulsâmes. Libre à vous de sourire… ; Perrier pensait, lui, que parmi des étoffes pour vêtements de deuil, cette défroque des morts n’était pas déplacée
Après la loi d’amnistie de 1880, qui autorise le retour des communards en France, Jules Perrier reste en Suisse où ses affaires sont florissantes, mais retourne régulièrement dans la maison familiale d’Ars-en-Ré, où il retrouve à la belle saison Elisée Reclus en villégiature dans la villa de William Barbotin.
Malade, Jules Perrier s’éteint le 29 novembre 1904, à son domicile, 4 rue des Terreaux-du-Temple à Genève.
Quant à la maison, place de la Chapelle à Ars-en-Ré, que Perrier avait fait restaurer, elle rassemblera les nombreuses peintures d’amis proche des anarchistes, dont des tableaux de Gustave Courbet et aussi des œuvres de Jean-Baptiste Corot, de William Barbotin, de Ferdinand Hodler, etc., et autres objets d’arts (960 articles en tout). Transformée en musée, elle est léguée par Jules Perrier à sa commune natale d’Ars, après son décès, « … et portera le nom de Musée communal d’Ars-en-Ré, offert par Jules Perrier à ses concitoyens ».
Les cendres de Jules Perrier sont déposées dans un cinéraire en clef de porte dans le musée, qui ouvre officiellement en août 1908. William Barbotin en assurera d’abord la direction. Malheureusement, au fil du temps la commune peine à entretenir le Musée qui se dégrade. En trop mauvais état après les nouvelles dégradations liées à la seconde guerre mondiale, les collections d’art restantes sont dispersées lors d’enchères publiques en septembre 1952 et l’immeuble vendu en 1955. Les cendres de Jules Perrier sont alors transférées dans une tombe du cimetière d’Ars.